Élèves en situation de handicap. Vers une meilleure reconnaissance du métier d'AESH

Par  Emma Calvet

Publié le 07/05/2024 à 15h31

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Les accompagnants bientôt mieux accompagnés
© Yann Peucat pour Le Pèlerin

Noah, souffrant de troubles de l'attention, est aidé par Colette de Billy, l'une des deux AESH de l'école élémentaire de Houssay (Mayenne).

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À l'école, les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) sont mal payés et peu considérés. Le Parlement entend réformer le statut de ces professionnels de l'aide.

"Amélie veut un chat pour son anniversaire. Elle a déjà son panier". L'exercice du jour, pour les CE1 de l'école élémentaire publique de Houssay, près de Laval (Mayenne), consiste à définir les différentes classes grammaticales. Au fond de la classe, un garçonnet s'interroge.

« Un nom propre, c'est reconnaissable, ça commence par une… », lui souffle Colette, à son côté. Colette de Billy est « accompagnante d'élèves en situation de handicap » (AESH). Ce matin, elle vient en aide à Noah, un élève atteint de troubles de l'attention. L'enfant regarde en l'air, triture son stylo, se lève. Depuis quelques jours, il est plus dissipé que d'habitude. Colette ne sait dire pourquoi. L'institutrice l'interroge du regard : « A-t-il réussi l'activité ? » Sa collègue penche la tête sur le côté. « Pas totalement », fait-elle comprendre.

Depuis 2006, le nombre d'enfants en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire a quadruplé, passant de 118 000 à 478 000 à la rentrée 2023, pour seulement 132 000 accompagnants. Le résultat de la politique mise en place depuis une décennie, qui a fait le choix d'intégrer, au nom d'une meilleure inclusion, les enfants handicapés au système scolaire général. Dans cette école de 86 élèves, trois enfants sont en situation de handicap. Des cas très différents que les deux AESH de l'établissement gèrent.

Les accompagnants bientôt mieux accompagnés
© photos Yann Peucat pour Le Pèlerin

Colette gagne un peu plus de 800 euros net par mois, un salaire qui ne lui suffirait pas si elle était « plus jeune », reconnaît-elle.

Manque de formation

Ce matin, Liam, scolarisé en grande section et atteint d'autisme, a refusé d'entrer dans l'école. Marie-Claude, son AESH, a bien tenté de le persuader. En vain. La famille a dû récupérer l'enfant. Dorian, lui, se débrouille quasiment seul en classe de CM2. Maintenant qu'il dispose d'un ordinateur tactile et d'une caméra grossissante, sa déficience visuelle n'est plus un obstacle aux apprentissages. « On peut avoir affaire à toutes sortes de handicaps, détaille Colette. Il faut savoir être patient et s'adapter. » Cette ancienne secrétaire n'a jamais suivi de formation. Il n'en existe d'ailleurs aucune. « Trois mois après la première embauche, durant 60 heures, on passe en revue les différents types de handicaps, les partenaires… Mais, il s'agit plus d'information que de formation », détaille le collectif « AESH, pas moutons ! ».

C'est un métier d'instinct où l'investissement l'emporte sur le salaire perçu. « Avant le secondaire, une AESH ne peut être mobilisée plus de 24 heures par semaine, pour 970 euros net par mois. Moi, je suis mobilisée 20 heures dans l'établissement. J'ai 60 ans, ce salaire me suffit. Mais pour une jeune personne qui commence, la situation est précaire », explique Colette de Billy. Un métier peu attractif alors même que plus de 200 millions d'euros ont été débloqués par le gouvernement à la rentrée 2022. Pour compléter le revenu, le sénateur Cédric Vial (LR) a déposé une proposition de loi, votée par le Sénat et adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale le 8 avril. « Cette loi doit permettre d'augmenter le temps de travail en englobant la pause déjeuner, donc porter la rémunération autour de 32 heures. On s'approche d'un temps plein », détaille le sénateur.

Un employeur unique

L'an dernier, Marie-Claude était mobilisée six heures par semaine sur le temps périscolaire, ce qui ne lui laissait que peu de répit au cours de la journée. D'autant plus que, si le temps scolaire est rémunéré par l'Éducation nationale, la pause déjeuner se trouve prise en charge par les collectivités. « Or, quand on cumule deux contrats, il n'est pas prévu de temps de pause obligatoire, explique le sénateur. La proposition de loi prévoit donc un seul et même employeur pour les AESH : l'Éducation nationale, ce qui permettra au personnel de souffler. » Ce serait un soulagement pour les petites communes, comme Houssay. « Il s'agit d'un budget important, détaille Loïc Faverais, directeur de l'établissement. La mairie a éprouvé des difficultés à financer un poste supplémentaire. » Idem pour les écoles privées. Ces dernières « n'avaient pas de solutions sur le temps de midi, car les collectivités ne prennent pas en charge le temps méridien, détaille le sénateur. Des enfants ont dû partir dans le public et les écoles privées ont souffert d'un manque d'inclusion ». Adopté avec modifications, le texte repasse au Sénat le 15 mai. Si le texte y est adopté, il entrera en vigueur dès la rentrée prochaine.

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